Lettre ouverte à monsieur le préfet de Charente-Maritime après la pollution aux hydrocarbures de Picoty

Le 30 Janvier dernier la société des essences PICOTY a informé vos services qu’une fuite d’essence SP95 provenant d’une canalisation souterraine reliant une cuve au poste de dépotage camions, s’était répandue dans le sous-sol du site industriel et probablement au-delà de ce dernier étant donné l’importance du volume écoulé. A cet égard, sachant que l’industriel effectue des bilans matière tous les 10 jours, on peut raisonnablement penser que ladite fuite s’est déclenchée avant le 30 Janvier.  

Le 31 Janvier les services de la DREAL ont inspecté le site puis mis en place, en concertation avec l’industriel, les mesures d’urgence s’imposant.

            Ce n’est cependant qu’à partir du 7 Février, soit 8 jours plus tard, que vous avez jugé bon d’informer la Mairie de La Rochelle, la CDA et la population, du moins pour ceux d’entre elle qui lisent la presse, de cet accident  affectant, rappelons-le, un site classé SEVESO seuil haut.

            Si le silence de l’industriel vis à vis de la population riveraine de PICOTY nous paraît  coupable, car il semble primordial que l’industriel prévienne immédiatement les habitants de l’accident et des risques potentiels en indiquant les premières précautions à prendre- celui des représentants de l’autorité de l’État l’est aussi et à divers titres. Ainsi, une réaction différée à un accident industriel ne peut que susciter dans le public l’idée que les responsables cherchent à cacher quelque chose, et, par là-même, nourrit un sentiment de suspicion sur les buts et l’action de l’État. Ce sentiment ne peut, à terme, qu’entamer gravement la confiance que les populations placent dans l’action publique des autorités responsables.

Informer est aussi montrer quelque marque de respect vis à vis de la communauté quelle que soit la teneur de cette information. Une communication immédiate de votre part aurait apporté la preuve que le premier souci de l’État, dans ce type de situation, était de se tourner vers les citoyens afin d’assurer leur sécurité.

 

            Les riverains du site agro-industrialo portuaire méritent mieux que cela, Monsieur le Préfet, car ce sont eux qui ont à vivre chaque jour avec cette double peine que constitue le fait de vivre à proximité des risques dus aux sites dangereux et d’en subir, au quotidien, les conséquences au plan du confort, de la sécurité et de la santé.

Est-il besoin de rappeler les envols constants de particules fines et de poussières issus des sites céréaliers et parfois irrespirables et les diverses odeurs pestilentielles qui forcent à vivre, en continu, les fenêtres fermées. Faut-il citer l’accumulation d’accidents qui ont frappé le site portuaire ces dernières années, dont, entre autres :

            – L’incendie important d’un hangar de stockage de pâte à papier mobilisant la quasi-totalité des eaux de lutte incendie disponibles et celui de l’ICPE ENVIROCAT au tout début de son exploitation.

            – Le déroctage sur le site de la Repentie et l’évacuation illégale d’eaux chargées qui a déclenché une pollution particulaire conséquente dans le Pertuis Breton, pollution qui a largement contribué à la mortalité massive des mollusques filtreurs qui y vivent.

            – Une ICPE soumise à autorisation préfectorale qui exploite une tour de séchage sans attendre ladite autorisation et qui, un an plus tard pollue le système d’évacuation des eaux pluviales de la CDA de La Rochelle à l’hydrogène sulfuré dépassant les valeurs limite de toxicité… Tout cela sans qu’aucune sanction ne soit prise.

 Vient aujourd’hui s’ajouter à cette liste une fuite de 256m3 d’essence polluant gravement les sols et la nappe phréatique et dont on peut se demander quelles auraient pu en être les conséquences s’il s’était agi d’une canalisation aérienne.

            Dès lors, les appels que les associations NE17, RESPIRE, Ré-Nature Environnement, MAT-Ré et l’APNR, ont pu lancer sur la concentration abusive d’installations hautement dangereuses sur un espace confiné tel que celui du site portuaire rochelais, lors d’une rencontre en Préfecture le 13 Janvier dernier, prennent une résonance toute particulière.  Les évènements récents viennent malheureusement confirmer nos craintes.                

            – Que comptez-vous faire, Monsieur le Préfet, pour faire face  au manque de respect de de la réglementation et des cahiers des charges dont font preuve certains industriels ?

            – Que comptez-vous faire, Monsieur le Préfet, pour mettre fin à cette « mansuétude » des services de l’État vis à vis des abus de ces industriels ?

– Que comptez-vous faire, Monsieur le Préfet, pour contrer ou simplement prévenir le risque quotidien d’atteinte à la sécurité et à la santé publique que font courir à la population rochelaise, ainsi qu’à l’environnement côtier et marin, certaines pratiques industrielles peu soucieuses des autres professionnels et des populations riveraines ?

            Plus simplement, Monsieur le Préfet, que comptez-vous prendre comme mesures pour faire prévaloir l’intérêt général sur les intérêts particuliers de certains groupes pour qui les temps présents sont au tout « économique ?»

 

Cinq associations de protection de l’environnement et du cadre de vie.

LETTRE OUVERTE A MONSIEUR LE PREFET DE CHARENTE-MARITIME