Quand l’intérêt général n’est plus défendu

Charente-Maritime

Lettre ouverte
des associations et collectifs citoyens opposés au traitement des déchets par incinération ou par TMB et favorables à une politique « zéro-déchet »

À l’attention du Préfet de Charente-Maritime.

Rochefort, le 3 janvier 2018, par le « collectif Alert’ Environnement Santé » Co-signataires : (liste PROVISOIRE et non exhaustive)

ACDN (Action des Citoyens pour le Désarmement Nucléaire) – ADRCC (Association des Riverains de la Circonscription de Cozes) – Agir pour l’Environnement – Alterenvies – ATTAC 17 – CDSP (Collectif pour la Défense des Services Publics et le bon usage des impôts) – CAC (Collectif d’Action Citoyenne) – Comité Régional de la Conchyliculture – Confédération Paysanne 17 – COUAAC (Collectif Unitaire Autogestionnaire Alternatif et Citoyen) – Eau Secours Services Publics – Envol Vert – EELV La Rochelle Ré Aunis – EELV Saintonge Cognaçais – FEVE (Force Ecocitoyenne de Vendée) – GAB 17 (Groupement des Agriculteurs Bio) – L’Esprit Citoyen – Ligue des droit de l’Homme du Pays Rochefortais – Nature Environnement 17 – Objectifs Biodiversité – Paillé Alert’ – Pays Rochefortais Alert’ – Presqu’île en Transition – R.E.S.P.I.R.E (Rassemblement d’Éco- citoyens pour Sensibiliser Protéger et Inciter au Respect de leur Environnement) – Rochefort pour tous – SBV (Saintonge Boisée Vivante) – SPPEF (Société pour la Protection des Paysages et de l’Esthétique de la France) – Surgères Alert’ – Veille Santé Envrionnement 17 – Vivre Bien en Aunis – Zero Waste France – Zero Waste Pays Rochefortais –

Monsieur Rigoulet-Roze,

Afin d’obtenir de vous une autorisation d’exploiter ses nouvelles installations, le Syndicat Intercommunautaire du Littoral (SIL) prétend agir au nom de l’intérêt général.

A la lumière des faits et du droit, nous constatons qu’il revendique abusivement la défense de cet intérêt général.

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1. L’intérêt général impose de respecter les décisions de justice

Afin de se justifier, le SIL s’est toujours réfugié derrière le droit. Mais, en moins de neuf mois, le TA de Poitiers et la CAA de Bordeaux viennent successivement de lui donner tort : l’autorisation d’exploiter a été annulée, et cette annulation a été confirmée en appel. Le SIL feint maintenant de s’interroger sur le droit lui-même !

Le SIL ignore-t-il à ce point le droit ? Ou bien en abuse-t-il en sollicitant le Conseil d’État, au prétexte d’un soi-disant problème de rétroactivité ?
Quelle que soit la réponse, le SIL ne défend manifestement plus l’intérêt général.

2. L’intérêt général nécessite de s’inscrire dans le droit

Construites en infraction avec la loi Littoral, les nouvelles installations doivent-elles être utilisées ?

L’incinération, sans tri des biodéchets à la source, augmenterait la production de polluants dans l’atmosphère et contribuerait au gaspillage des ressources.
En totale contradiction avec les objectifs de la lutte contre le changement climatique, les nouvelles installations produiraient deux fois plus de gaz à effet de serre que l’incinérateur actuel.

Dans le domaine de l’urbanisme comme dans celui de l’environnement, le SIL ne défend absolument pas l’intérêt général.

3. L’intérêt général exige de mettre fin aux dérives financières et budgétaires du SIL

Quand la Communauté de Communes du Bassin de Marennes (CCBM) a adopté la redevance incitative, ses 15.344 habitants n’ont produit que 186 kg/habitant/an d’OMR.

Si les 198.900 habitants du territoire du SIL les imitaient, leur production se réduirait à 37.000 tonnes d’OMR par an: le recours à l’incinérateur actuel resterait possible.

Il serait même préférable aux nouvelles installations, car bien plus rentable. Incinérer, puis enfouir les cendres coûte très cher (et pollue). Éviter l’incinération de 32.000 tonnes d’OMR par an générerait une économie d’environ 1 M€ chaque année !

Par ailleurs, le SIL devrait même profiter de l’annulation par la justice de l’autorisation d’exploiter pour renégocier, dans l’intérêt général, la délégation de service public qui le lie à l’exploitant des installations (Setrad).

Enfin, le SIL n’a aucun moyen juridique d’agir sur le tri des déchets à la source, ni sur leur collecte : il est tributaire des EPCI membres.
Et le SIL n’a aucune capacité d’autoconstruction, ni d’autofinancement, ni d’exploitation des installations : il est respectivement tributaire de Vinci, des banques et de Setrad.

En raison de ses statuts et des solutions de traitement qu’il a choisies, en contradiction avec l’économie circulaire, le SIL n’est plus qu’un intermédiaire entre les EPCI membres et les groupes privés.

Et, comme les EPCI membres (hormis la CCBM) ont négligé le tri des biodéchets à la source et la redevance incitative, le SIL ne défend plus l’intérêt général, mais seulement des intérêts privés.

4. L’intérêt général commande de préserver la population des conséquences mortelles d’un séisme (en respectant la réglementation)

En France, toute construction est régie par un arrêté (celui du 22 octobre 2010), relatif à la classification et aux règles de construction parasismique applicables aux bâtiments de la classe dite « à risque normal ».
A la lecture de cet arrêté, il apparaît que l’ensemble des nouvelles installations aurait dû être conçu et construit en catégorie d’importance III ou IV.

Or, depuis février 2013, Bureau Veritas et Vinci se sont contentés des catégories d’importance II (pour le bâtiment administratif et la salle de commande) et I (pour tout le reste) !
Alors qu’une simple chaufferie collective « bois » est soumise à la catégorie d’importance III, cette énorme chaufferie collective « déchets » (qui produit des gaz de combustion toxiques) n’est pas aussi bien protégée…

Le risque le plus probable est celui d’un dysfonctionnement des équipements, susceptible de survenir même avec un faible niveau de déplacement ou de déformation consécutifs à un séisme.
En avril 2011, l’Association Française du génie ParaSismique (AFPS) attirait de nouveau l’attention sur ce point, dans le cadre du Plan Séisme piloté par le ministère de l’Écologie. Le degré coupe-feu ne serait alors plus assuré : la conséquence immédiate en serait la libération de grandes quantités de substances toxiques, directement dans l’atmosphère !

En s’entêtant à vouloir exploiter ces nouvelles installations, impropres à leur destination et qui menaceraient en permanence la population, le SIL ne défend clairement plus l’intérêt général.

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La violation d’un arrêt de Cour d’appel renforcerait-elle l’autorité de l’État dans le département ? Non, au contraire !
La mise en danger permanente de sa population assurerait-elle mieux l’ordre public ? Non, au contraire !

Par conséquent, Monsieur Rigoulet-Roze, montrez-vous digne de votre fonction. Entendez les LANCEURS D’ALERTE !
Défendez l’INTÉRÊT GÉNÉRAL !
REFUSEZ l’autorisation d’exploiter !